jeudi, décembre 21, 2006

J'ai arrêté de mélanger. Le chapitre 5 sera le troisième roman "La Fille du Rien".

Tilou

samedi, novembre 25, 2006

Quatre jours. L’attente dura quatre longs jours pendant lesquelles, il s’enferma chez lui, incapable de penser à autre chose qu’aux événements du week-end. Il essayait de comprendre ce qui s’était passé. Il s’en voulait de ne pas avoir réussi à trouver le moyen d’éviter l’inévitable. Mais c’était inévitable. Cela, il le savait que trop bien.

Quatre longs jours à tourner en rond dans sa tête, à dérouler chaque seconde de cette semaine. Aucune logique dans tout cela. Simplement, un glissement vers un désarroi insensé et incompréhensible. Mais voilà, comment expliquer les choses sans se vendre complètement ? C’était impossible. Il ne voulait pas dire les choses : elles étaient trop tristes. Pourquoi gâcher du papier à écrire des choses moches. S’il devait la revoir, c’était pour reprendre l’histoire à l’étape du bonheur. Cet épisode, on pouvait le mettre aux archives. En même temps, que s’était-il passé ? La vérité devenait évidente pour tout le monde. Qui cela pouvait-il gêner ? Au bout de trois mois, c’était suffisant pour commencer à faire quelque chose, à faire un choix. Qui cela surprenait-il ? Personne. Tout le monde était plus ou moins au courant. Et puis, c’était mieux en fait. C’était défaire les chaînes de leur relation. Elle était déjà belle. Elle ne demandait plus qu’à s’envoler. Mais voilà. Le doute commençait à s’emparer de lui. Elle, le réalisait-elle ? Réalisait-elle que c’était une étape pour magnifier l’histoire ?

jeudi, octobre 12, 2006

Une histoire simple veut raconter l'histoire d'un choix qui n'a pas été fait, d'une quête d'un pourquoi, comment. C'est un brouillon qui évolue de jour en jour. Si je l'ai mis là, c'est pour les critiques qui pourraient améliorer le récit et sa compréhension. Comme c'est une histoire à mi-chemin entre ma réalité et la fiction, c'est pas toujours simple de lire les choses avec un oeil objectif...

Bonne lecture et merci d'avance...

lundi, octobre 09, 2006

UNE HISTOIRE SIMPLE

Prologue

Le soleil est haut et brille de tout son éclat dans un ciel bleu sans tache. Il fait une chaleur torride et il n’y a pas un brin d’air pour rafraîchir l’atmosphère. Léa et Loïc jouent dans le jardin sur la balançoire sous l’œil absent de la jeune femme, assise en tailleur sur la terrasse, un livre à la main. Elle ne lit pas mais regarde les enfants s’amuser comme elle contemplerait la beauté froide d’une toile de musée, comme si elle était étrangère au spectacle qui se déroule devant ses yeux. Pourquoi éprouve-t-elle ce genre de sentiments ? C’est indigne d’une mère et en même temps, c’est si peu faux. Ce n’est pas la première fois qu’elle a cette sensation ces derniers mois. Cela s’est répété à plusieurs reprises sans qu’elle ne puisse ni empêcher l’apparition de ce sentiment, ni en comprendre exactement l’origine.

Elle relève la tête et la secoue pour faire sortir ces lamentables réflexions.

Le carillon de l’entrée retentit.

« Ca sonne, Maman ! Ca sonne… » Entonne Léa de sa voix suraiguë.

Maman incline la tête et esquisse un sourire pour signifier aux enfants qu’elle a entendu. Au bout d’un instant, elle pose le livre sur la dalle brûlante de la terrasse et se lève. Elle va répondre. Elle marche pieds nus et le carrelage de la maison, à l’abri des rayons du soleil derrière les volets tirés à demi, lui paraît à moitié gelé. Son allure est particulière et ne ressemble à nulle autre. Elle se dandine d’une façon tout à fait féminine bien qu’elle ait une tendance à marcher le pied tourné à l’extérieur.

De dos, cela souligne la taille mince de la jeune femme et renforce le contraste d’un tour de hanches harmonique et une relative étroitesse d’épaules. Cette dernière entoure une poitrine d’une dimension moins prononcée que l’ordinaire le veut. Ses cheveux blonds sont délicatement en désordre et arrivée devant le panneau de la porte d’entrée, elle les réajuste d’un geste.

Le jeune homme planté dans l’encadrement semble un instant surpris. « A-t-elle une tête de folle ? » se demande la jeune femme. Le garçon s’assure de son identité.

« Vous êtes de la région ? » demande-t-il.

La jeune femme hausse un sourcil.

« Je ne crois pas… »

« Je demande ça comme ça… C’est votre nom… » dit le jeune homme pour s’expliquer.

Puis il enchaîne.

« Bon, j’ai un colis pour vous, Madame. Pourriez-vous me remplir ce bon, s’il vous plaît ? Faut signer… Là. »

La jeune femme pose un doigt sur ses lèvres et considère le morceau de papier d’un œil hagard. Au bout de quelques secondes, elle relève la tête et demande d’une voix lointaine.

« Vous n’auriez pas un stylo ? »

« Bien sûr, Madame. Tenez. Je vais vous chercher la marchandise pendant ce temps-là… »

Le mot marchandise la fait sourire. Elle remplit le bon nerveusement. Elle ne sait pas exactement pourquoi mais elle sent une tension s’emparer d’elle. Qu’est-ce que ce colis ?

Dans la case « expéditeur » est écrit le nom de sa mère et dans celle du destinataire, son nom mais son nom de jeune fille. Elle comprenait alors pourquoi le livreur avait tant insisté sur son identité. C’était étrange. Son mariage n’était pas récent, ni en instance de rupture. Si ce n’était pas l’extase en ce moment, ce n’était pas non plus une source de soucis.

« Vous avez terminé ? » demande le coursier.

Elle lui tend le stylo et le bon. En retour, elle prend alors la petite boîte qu’il lui présente.

« Merci. »

« Merci à vous, Madame et bonne fin de journée. »

« Bonne journée. »

Elle referme la porte et elle fixe le colis d’un œil intrigué.

Elle retourne sur la terrasse et dans le jardin, les enfants jouent toujours à côté de la balançoire.

*

« C’est quoi, Maman ? C’est un cadeau ? » demande Léa en chantonnant.

« Oui, c’est quoi ? » renchérit Loïc.

Maman attend quelques secondes avant de répondre. Les enfants n’ont pas la notion du temps et ils posent toujours les questions qu’il ne faut pas aux mauvais moments. Ce n’est pas méchant, elle le sait mais elle aimerait parfois qu’ils s’abstiennent.

« C’est Mamie qui envoie cela à Maman mais c’est personnel… »

« Tu nous dira ce que c’est ? »

« Peut-être si vous êtes sages. »

Elle commence de déballer la boîte. A l’intérieur, il y a un paquet plus petit qui laisse supposer qu’il s’agit d’un livre. Il y a aussi un petit mot.

Carole,

J’ai trouvé ce livre en débarrassant le petit meuble qui était à l’époque dans ta chambre et qui avait fini dans la cave. Ton beau-père est dans sa période de grand nettoyage de printemps quoique cela ne soit plus de saison et veut le mettre aux encombrants. Je l’ai donc vidé et je suis tombé sur ce bouquin. Il a certes l’apparence d’un simple livre de poche et tu l’as sûrement déjà lu mais, d’une part, je ne me souvenais pas de quand tu avais pu l’acheter et d’autre part, une chose singulière était coincée entre les pages. Je pense que tu sauras de quoi il s’agit car, de mon côté, cela ne me rappelle rien. Je suis quasiment sûre que c’est à toi.

A bientôt, je t’embrasse,

Maman.

Carole replie le mot. La curiosité et la gêne se font de plus en plus pressantes.

« Alors, Maman, c’est quoi ? »

Les deux loustics étaient plantés devant elle trépignant d’impatience. En lisant le mot, Carole avait complètement oublié leur présence.

« Je ne sais toujours pas, mes chéris, mais c’est personnel. Retournez vous amuser, s’il vous plaît, mes puces. Je vous le dirais plus tard. »

Comme un duo parfaitement réglé, les deux bambins pivotent sur leurs petites jambes et, les sourcils froncés, déçus de ne pas avoir contenté leur curiosité, retournent vers la balançoire en se tenant par la main. Carole les regarde s’éloigner et une fois qu’elle les juge à bonne distance, elle commence de défaire le paquet.

Ce qu’elle découvre, c’est effectivement un livre de poche, un roman qui avait eu un succès certain en son temps. Comment l’avait-elle eu ? Elle s’en souvenait parfaitement. Elle feuillette rapidement les pages à la recherche de la chose dont sa mère parle dans sa missive. Mais elle sait déjà ce qu’elle va trouver. Un nombre incalculable d’images lui reviennent en mémoire.

Carole relève la tête. Les enfants s’amusent toujours près la balançoire, mais leurs rires paraissent s’éloigner petit à petit, et cette vision s’efface pour laisser à la place à d’autres.

Chapitre 1

L’après-midi touche à sa fin. Les enfants sont rentrés et ils dessinent assis à la table de la salle à manger. Carole va ranger le livre dans une petite boite à chaussures au dessus de son armoire. Elle espère que les enfants auront oublié le colis d’ici que David rentre. Elle regarde l’heure. En même temps, il ne devrait plus tarder.

Au même moment qu’elle pense à cela, elle entend la voiture légèrement glisser sur le gravillon et s’arrêter devant le garage. « Faites que les enfants tiennent leur langue pour une fois… ».

La porte s’ouvre et David apparaît dans l’encadrement.

« Alors toujours en vacances ! »

Carole sourit malgré elle. Cela fait peut-être des milliers de fois qu’elle l’entend dire cela avec la régularité d’un métronome. C’est étrange qu’il ne se rende pas compte de cela.

« Où sont les monstres ? » fait-il après l’avoir prestement embrassé.

« Dans la salle à manger. »

David disparaît alors et des cris de joie, d’amusement commencent à résonner dans la maison. Carole pense. Elle ne devrait pas ressentir cette espèce de lassitude chaque fois qu’elle voit David. C’est un bon père. Un type gentil qu’elle connaît depuis des lustres et dont elle sait quasiment tout maintenant. Mais voilà, il ne se rend compte de rien. C’est comme si le fait qu’il ne passe rien était pour lui quelque chose à laquelle il fallait s’accrocher à tout prix. Plusieurs fois, ils avaient discuté de cela mais il ne comprenait pas.

« Je comprends et maintenant avec les enfants… »

Les enfants. Oui.

Carole secoue une nouvelle fois la tête pour évacuer toutes ces vilaines idées de sa tête. Elle reprend son souffle et s’en va rejoindre le tumulte de la salle à manger.

*

Le dîner se passe bien. Les enfants excités par leur cher Papa ont complètement oublié le colis de l’après-midi. Comme de coutume, David parle du boulot, des mêmes histoires, des mêmes conclusions que d’habitude. Seuls les personnages changent, somme toute. Après le dîner, David s’occupe de coucher les enfants pendant que Carole s’occupe de la vaisselle.

Elle n’a pas tout à fait fini lorsqu’il revient.

« Ca y est, ils dorment. Je vais regarder la télé : tu me rejoins ? »

Carole répond d’un signe de tête. Intérieurement, elle sourit. Quand elle rentrera dans le salon, elle retrouvera David en train de dormir devant la télévision comme neuf fois sur dix. C’est cela, sa vie, non sans avoir un léger pincement au coeur.

Elle repense au colis. C’est étrange. Même si elle se souvient des éléments de l’histoire autour de l’objet coincé entre les pages du livre, elle ne se rappelle plus l’histoire en elle-même. Et si elle se force, elle tombe sur une espèce de trou noir. Drôle de machine que la mémoire.

Elle range la dernière assiette dans le placard. En tendant l’oreille, elle perçoit d’ores et déjà, le ronflement d’David. Elle sait qu’elle va aller le réveiller pour lui dire qu’il sera plus à l’aise dans le lit et qu’elle retournera soit regarder la télévision, soit surfer sur Internet quelques heures pour tromper le sommeil qui ne viendra pas.

*

Le radio-réveil se met en marche. Comme toujours, c’est Carole qui se réveille et qui le coupe. En même temps, elle se lève. Ce n’est pas la course mais presque. Aujourd’hui, c’est la rentrée des classes. Il faut accompagner les gosses au jardin d’enfants. Carole passe rapidement dans la cuisine pour mettre en fonction les différents appareils ménagers qu’elle a consciencieusement préparés la veille pour le petit déjeuner de tout le monde et elle s’en va à la salle de bain. Toilette rapide, un petit coup de crème, l’affaire est vite emballée. Quand elle retourne dans la cuisine : tout est prêt. Il n’y a plus qu’à réveiller les enfants puis David qui se sera rendormi entre temps.

Léa est grognon et Loïc, lui est déjà debout. Carole les emmène à la toilette. Dix minutes plus tard, les gosses sont devant leur petit déjeuner. Carole regarde l’heure, juste histoire de se rassurer car elle pourrait faire les choses les yeux fermés.

*

Il faut faire vite. Le centre aéré organise une petite excursion dans un parc d’attraction à vingt-cinq kilomètres environ. Carole fait un créneau hasardeux pour se garer. Elle ouvre les portières, dit « A ce soir » aux enfants. Ceux-ci disparaissent par le portail, heureux de sauter dans les bras des animateurs et animatrices du centre. Carole relève la tête et observe dans la rue un homme adossé au mur d’une maison qui fait l’angle. Il vient de regarder la scène et lui sourit. Carole n’a pas envie de le lui rendre. Qui est-il ? Encore un de ces détraqués qui font parfois la une des journaux tous les quatre matins ? Et puis elle se ravise. Elle secoue la tête en souriant. Elle ferme les yeux.

Chapitre 2

Il est sept heures du matin quand Luc reçoit le message.

« RDV à trois heures au QG comme avant. »

L’heure n’est pas habituelle pour l’expéditeur. Pas d’objet à ce rendez-vous. Cela serait trop simple.

Hier, c’était l’anniversaire de Carole. Luc n’était pas de la fête et pour cause. Il y a quelques semaines, cela aurait peut-être encore été possible mais maintenant.

Le radio-réveil se met en marche. D’entrée, emmitouflé sous ses couvertures, Luc se confronte aux nouvelles du pays et du monde. Celles-ci sont plutôt mauvaises mais rien de révolutionnaire. La terre continue de tourner sur elle-même, de surcroît dans son sens habituel : donc aucune crainte à avoir pour la journée qui pointe le bout de son nez, sinon ce message.

Il se lève, cherche l’interrupteur de la chambre et met la lumière pour repérer l’endroit où ses lunettes ont échouées pour passer la nuit. Il les cale sur son nez en même temps qu’il se rend dans la cuisine et met la cafetière en marche. Il met la radio et va couper le radio-réveil. Il appuie plutôt deux fois qu’une sur la remise à zéro : il veut être sûr.

(La suite en cours d’écriture)

Chapitre 3

« Non, cela ne s’est pas passé comme cela. » laisse échapper tout fort Carole.

« Qu’est-ce qui ne s’est pas passé comme cela ? »

Elle a toujours les yeux fermés et la voix qui vient de lui poser une question la paralyse. Elle l’a parfaitement reconnue. C’est impossible. Elle sent une main dont elle se rappelle instantanément le contact se poser sur son épaule.

« Ca va ? »

Carole tourne la tête vers la voix et ouvre les yeux. Le visage qu’elle voit alors, elle le reconnaît tout de suite, malgré… « Je rêve… » Se dit-elle. C’est Luc qui la regarde les yeux grand ouverts, quelques années en plus. Il a légèrement grossi, les joues moins creuses, son visage s’est adouci. Il porte toujours ses lunettes, à peu près les mêmes qu’avant, et il a maintenant une barbe rase, poivre et sel. Il ressemble de plus en plus à son père.

Carole regarde autour d’elle : elle est toujours dans la même rue, au même endroit.

« Où sont Léa et Loïc ? » demande-t-elle d’un ton angoissé.

« Ils viennent d’entrer… Je ne pensais pas que cela t’angoisserait autant de les mettre au centre… »

« Qui… est leur père ? »

Carole manque s’étrangler en réalisant la question qu’elle vient de se poser, et Luc sursaute légèrement. Elle n’a pas fait exprès de poser la question tout haut mais cela lui a échappé. La réponse semblait évidente.

« Moi. Aux dernières nouvelles… A moins que je n’ai raté un épisode… Ou que je n’ai pas fait assez attention au facteur… »

Luc n’a pas changé et il a gardé cette habitude de marquer ses réparties d’un petit humour à la fois bienvenu et un peu agaçant car empreint d’un second degré ironique. Carole se souvient que cet humour rendait parfois quelques services et, dans d’autres occasions, cela donnait un cynisme pas forcément adéquat à la situation. Elle essaye de lire ce qu’il peut penser à cet instant dans ses deux billes noires qui lui servent d’yeux, mais rien à faire. Dans le doute, elle préfère prendre un air tourmenté qu’elle n’a guère de mal à tenir, vue la circonstance.

« Excuse-moi… Je ne sais pas ce qui m’est arrivée… J’ai eu l’impression de débarquer dans une vie qui n’était pas la mienne… Tu vois ? »

Luc prend une mine moitié déconfite, moitié compréhensive.

« Assez mal, en vérité… Mais soit, je ne pensais pas que le fait de mettre les enfants au centre pouvait te perturber autant. »

« Tu ne fumes plus ? » demande Carole d’une toute petite voix.

« Certes et cela va faire un petit bail… Un truc comme onze ans ? Si je ne me trompe pas. Et tu sais pourquoi j’ai arrêté ? Je t’avais dit qu’il me fallait une bonne raison et elle est arrivée. Si tu me dis que cela n’en valait pas la peine, là je crois que je vais t’en vouloir. »

Luc éclate de rire. Il fait toujours cela quand il ne sait pas quelle contenance adoptée.

« Bon ce n’est pas tout cela… Je te dépose à ton boulot et moi, je file au mien. Allez, du nerf ! En voiture… »

Carole monte dans la voiture dont Luc a ouvert la portière comme un parfait chauffeur. Il referme, contourne le véhicule et s’installe à la place du conducteur.

*

Comment est-ce possible ? Que s’est-il passé ? Où est-elle ? Qu’a-t-elle fait pour se retrouver dans cette voiture, avec ce Luc qui semble être son époux, le père de ses enfants ? Elle se dit qu’elle est en train de faire un rêve ou un cauchemar. Elle reste silencieuse. Il vaut mieux ne pas poser trop de questions qui puissent paraître suspectes. Luc est gentil avec elle. Il a pris sa bizarrerie pour de l’angoisse et cela l’arrange bien. En fait, la seule personne pour qui les choses ne tournent pas rond : c’est elle.

Soudain elle a un doute, ou plutôt une idée. Est-elle encore Carole ? Après tout, Luc n’a pas prononcé son prénom à aucun moment. Elle se redresse sur le siège et abaisse son pare-soleil.

« Qu’est-ce que tu cherches ? »

« Je voulais jeter un coup d’œil sur ma coiffure… Mais il n’y a plus de miroir… »

« Il n’y en a jamais. Enfin… Depuis qu’on a la voiture… Ca va faire trois ans. »

« J’avais oublié… » répond sèchement Carole.

D’un seul coup, elle s’aperçoit qu’elle a un sac à main, posé à ses pieds. Luc s’arrête.

« Voilà, Madame est arrivée à destination. »

Carole jette un coup d’œil par la vitre. Elle reconnaît les lieux mais elle ignore où elle est sensée être arrivée : où travaille-t-elle dans cette dimension ? Cependant, il lui faut agir un peu plus vite pour éviter de prononcer l’étrangeté de son comportement. Elle attrape le sac et sort de la voiture. Elle va fermer la portière lorsque Luc l’interpelle :

« Tu n’oublies pas quelque chose ? »

Carole réfléchit : ce n’est pas le moment de jouer aux devinettes. Du coup, elle se souvient que c’était un des grands défauts de Luc. Il adorait jouer avec cela. Cela l’énervait dans le passé et à l’instant même. Elle sourit pour gagner du temps et lui, continue de la fixer sans lui laisser aucun indice sur cet oubli. Elle a la sensation que le temps que le temps s’allonge dans des proportions inimaginables. Elle se sent désespérée de ne pas trouver.

« Je n’ai pas le droit à un petit bisou avant ce soir ? »

Qu’elle est bête ! C’est évident. Et même temps, cela ne l’est pas.

« Bien sûr que si. Excuse-moi, j’ai la tête ailleurs… En voilà un pour tenir toute la journée !... »

Elle s’avance vers lui et l’embrasse du mieux qu’elle peut. C’est le genre de truc impeccable pour se faire démasquer. Drôle de sensation. Pas tout à fait étrangère en réalité. Elle a du en faire un peu trop d’ailleurs car aussitôt après Luc commente :

« Flûte alors, là, j’ai fait mes provisions pour toute la semaine… »

« T’es bête. Allez, à ce soir »

« A ce soir… »

Carole lui fait un petit signe et attend que la voiture disparaisse dans l’angle de la rue pour murmurer :

« Et maintenant, c’est quoi la suite du programme ? Car là voyez-vous je manque d’imagination et sans aide, je crois que je ne vais pas aller très loin… C’est une histoire de dingues… »

Carole commence à rire toute seule, nerveusement, en contemplant les divers immeubles qui l’entourent. Dans cette situation, impossible de faire machine arrière, elle ne peut qu’avancer. Oui, mais pour aller où ?

Chapitre 4

Va-t-elle mourir sur ce trottoir ? Ou le Grand Mécanicien va-t-il lui faire un signe ou quelque chose d’autre pour l’aider et l’empêcher de faire le pied de grue au milieu de la rue ? Comme dit l’autre, il y a comme un problème. Quoique il soit, le Grand Truc a dû l’entendre. Carole voit une jeune fille s’approcher d’elle en slalomant, comme si elle n’osait pas l’aborder. Encore une collègue complètement givrée, ou à moitié au moins.

« Madame Bogier ? »

« Oui, c’est évident… » réplique Carole d’un ton sarcastique qu’elle ne peut s’empêcher de prendre.

« Aurélie Boiron. Vous ne voyez peut-être pas ? Je suis en stage à la documentation… Madame Palisse nous a présenté rapidement hier. »

*

Les enfants sortent et Carole se retrouve seule dans la salle de classe. Elle n’arrête pas de penser. Il faut qu’elle retrouve son ex. Elle range ses affaires et quitte l’établissement. Elle se dit qu’elle va bien trouver un bureau de poste dans le quartier et qu’ils auront bien un annuaire de la ville. Avec un peu de chance, son ex n’a pas quitté la ville.

Alors elle déambule dans les rues à la recherche d’un panneau indicateur qu’elle finit par trouver. En fait, le bureau de poste n’était pas très loin. Seulement, le panneau indicateur, lui, oui.

Elle entre et va directement au guichet. Elle demande un annuaire et l’employée lui désigne l’ordinateur posé dans un coin.

« Vous consultez les pages blanches, cela reviendra au même. »

« Merci. »

Après quelques minutes de recherches, Carole récupère l’information qu’elle cherchait. Maintenant qu’elle a le numéro de téléphone de son ex, il ne reste plus qu’à l’appeler. Elle regarde sa montre. Il commence à se faire tard. Il faut qu’elle rentre. Elle aurait bien voulu ne pas remettre la chose au lendemain mais il faut bien qu’elle réponde aux contraintes de sa vie d’emprunt.

*

Quand elle pousse la porte, elle se souvient alors que c’était elle qui devait aller chercher les enfants. Luc ne se gêne pas pour lui faire la remarque.

« La monitrice m’a appelé au boulot. T’avais oublié ? »

Carole hoche la tête en faisant la moue.

« J’avais une course à faire et j’ai complètement zappé. »

Luc prend une mine déconfite.

« Bah, je ne sais pas ce que tu as en ce moment mais cela n’a pas l’air de tourner très rond. Tu ne crois pas que je devrais m’occuper des gosses le temps que cela passe. »

Carole n’aime pas ce genre de remarques car elle se sent fautive à chaque fois. Mais il faut bien se rendre à l’évidence que la proposition est adéquate.

« Je crois que c’est préférable, en effet, je te ferais signe dès que ce sera passé. »

Ce qu’il y a de bien avec Luc, c’est qu’il ne cherche pas midi à quatorze heures comme d’autres. Il prend en compte la situation et il s’adapte. Du moment qu’on lui dit. Dans une autre dimension, cela aurait été une palanqué de questions auxquelles elle n’aurait jamais voulues répondre. C’est étrange mais même si les souvenirs ont du mal à lui revenir, elle se rappelle cette différence de Luc.

*

Carole prend l’enfant par la main et ils traversent la rue. Son cœur bat très fort. Elle jette un regard sur les gens assis à la terrasse du café : elle ne reconnaît personne. Et puis, une main s’agite dans le fond du bar. Elle reconnaît aisément la silhouette malgré les années. Elle entre et s’approche de l’homme. Il la regarde avec un sourire un peu niais, un peu amusé. Elle ne sait pas trop.

« C’est le tien ? » fait l’homme en désignant l’enfant.

Elle secoue la tête.

« Non, je n’ai pas de… »

Elle se pince les lèvres et puis elle se reprend.

« Non, celui-là c’est … Sa mère ne peut pas s’en occuper le midi donc c’est moi qui m’y colle. »

L’homme fronce les sourcils.

« Ah oui ! » se reprend Carole.

« Je bosse dans un centre d’éducation spécialisé. »

Elle s’assied.

« Ca fait étrange de se revoir après ces quelques années. Quand j’ai reçu le message, je me suis dit au début que cela ne pouvait être qu’une mauvaise farce et puis… Je l’ai écouté une seconde fois… Cela paraissait assez important, pour toi du moins… Je suis venu. »

Carole prend un sourire pincé tout en hochant la tête.

« Je sais… Mais c’est très important. Je ne peux pas te raconter l’histoire depuis le début, parce que… Ca te semblerait complètement délirant… »

« Tu n’as pas changé en somme » la coupe l’homme.

« Enfin… Un peu c’est tout. Pas le temps de dire, salut comment tu vas ? Toujours dans tes histoires extraordinaires… »

Carole soupire. Il n’a pas changé non plus, lui aussi.

« Je ne veux pas être déplaisante mais tu vois, cette fois, je me serais bien passée de faire cette démarche. En même temps, là tu vois, je n’avais pas vraiment le choix. »

Elle détourne la tête, un instant. Elle ne doit pas s’agacer comme cela. En plus elle a absolument besoin de son aide.

« Bon… Excuse-moi. Je suis un peu sur les nerfs en ce moment. »

« C’est pour cela que je disais que tu n’avais pas changé. En autre. »

L’homme sourit.

« Bon, c’est quoi ton problème et c’est quoi ce que tu veux savoir ? »

Carole reprend son souffle. Cela y est, on est au moment crucial. Comment amener la question pour qu’elle ne paraisse pas trop étrange ?

« Pour tout te dire, je suis une thérapie chez un psy, rien de grave. Mais j’ai un problème et d’après mon toubib, il faudrait que j’éclaircisse ce point, je ne me souviens plus de ce qui c’est passé avant, pendant et après notre rupture. »

« T’es amnésique encore à aujourd’hui ? »

« Très drôle. Mais bon. Voilà, j’aimerais si ce n’est pas trop te demander que tu me racontes ta version de notre rupture. »

« Cela me rassure que cela te perturbe toujours… »

« Crois bien que c’est vraiment à mon insu et que non, je n’y pense pas tous les jours et que cela ne m’empêche pas d’avancer dans ma vie… »

« Ne te fâches pas comme cela. Avec les années, c’est bon, j’ai fait moi aussi du ménage dans tout ça. Mais je n’arrive pas à comprendre pourquoi tu veux ressortir ces vieux fantômes. »

« Ce n’est pas moi, c’est mon psy » répond Carole du tac au tac.

Après un long silence, l’homme finit par reprendre.

« Tu veux quoi ? La version courte ou la version longue ? »

« Celle où il y a suffisamment de détails pour que je puisse essayer de voir s’il y a encore des choses dont je me souviens. »

« Tu as du temps alors ? »

« Pas vraiment… Mais je compte sur toi pour ne pas trop t’étaler… »

Chapitre 5

Comment raconter cette histoire ? Il y a un peu plus d’une semaine, il aurait pu vous dire que c’était sûrement la plus belle histoire de sa vie. Mais voilà, la vie est ainsi faite que parfois, les choses peuvent se dégrader en l’espace de quelques jours, de quelques minutes. Cette histoire a commencé dans la chaleur d’un mois de juin, somme toute un peu bizarre. Elle s’est finie dans la chaleur d’un mois de septembre complètement pourri.

C’est une histoire toute simple à la base : deux êtres un peu paumés tous les deux qui se rencontrent, qui parlent, qui s’apprécient et qui décident de faire un petit bout de route ensemble malgré les incohérences de l’un et de l’autre. Une histoire simple et compliquée sur le papier mais ces deux êtres n’en avaient que faire, du moins au début.

C’est elle qui a fait le premier pas. Elle ne savait pas trop pourquoi, ni trop où elle allait en faisant cela. Elle n’anticipait rien. L’avenir, c’était bien trop compliqué d’y penser. Elle avait bien un copain mais elle ne l’aimait plus, ils passaient leur temps à s’engueuler. Il ne se passait plus rien entre eux depuis de six mois et puis voilà. C’était le creux de la vague.

Pour lui, c’était un peu comme une seconde chance. Il venait juste de terminer une histoire de trois mois qui n’avait jamais voulu décoller.

*

Il venait tous les midis avec ses collègues de boulot. C’était étrange, mais il paraissait un peu à part, parfois absent. C’est peut-être pour cela qu’elle l’avait remarqué. En plus, il avait une tête qui lui plaisait. Il paraissait gentil chaque fois qu’il passait à la caisse. Parfois, il ne disait rien. Parfois, il lançait un petit mot d’encouragement. Chaque fois, elle essayait de lui jeter un regard pour voir si elle pouvait voir un quelconque intérêt. Mais c’était difficile de se faire une idée.

*

Le boulot, ce n’était pas reluisant. Parfois chiant. Tous les midis, dans le même restaurant. Mais il y avait une nouveauté : une petite serveuse tout mignonne, gentille. Quand il passait à la caisse, il essayait quand il n’avait pas trop la tête dans les nuages de dire un mot gentil et de jeter un regard à cette petite jeune fille. Elle était peut-être un peu jeune pour lui.

*

Janvier, février, mars. Toujours le même scénario. Elle en avait parlé à sa collègue. Bien sûr, cela pouvait paraître risible. En plus, c’est vrai qu’elle n’était pas libre. Elle avait son mec qu’elle ne se résignait pas à quitter. Par défaut d’autre chose, pas manque de courage, par peur de lui faire mal. En même temps, elle le connaissait si bien dans tous ses défauts et ses qualités. Pourquoi aller voir ailleurs ? Envie d’autre chose. Envie de sortir de cet ordinaire réglé comme du papier à musique.

*

Mars. Drôle d’histoire. Sortie ciné dans la semaine et une petite amie comme cadeau d’anniversaire. Les choses se font bizarrement des fois. Bon, il ne savait pas trop où il allait. En plus, elle bossait dans la même boîte que lui : ça pouvait devenir compliqué que les choses tournent bien ou mal. Problème, il faut garder cela sous silence, c’est elle qui le veut. Il ne sait pas pourquoi mais bon, s’il le faut, il peut respecter cette règle.

*

Bon, ça y est, il sait. Comment ne le saurait-il pas avec toutes les remarques des collègues ? Il sourit mais c’est tout. Il est timide comme elle.

*

Pourquoi des règles ? Elle ne veut pas qu’on lui dise « je t’aime ». Cela va être compliqué. Elle dit qu’il lui faut du temps. Pourquoi pas ? Il a quand même l’impression d’en être au même point qu’il y a un mois. Il veut aller trop vite sûrement. On lui fait toujours ce reproche. Alors patience.

*

Il sait. Il sait aussi qu’elle n’est pas seule mais que voilà, cela ne sera pas un problème. Elle sait aussi par ses collègues qu’il est avec quelqu’un. A priori, cela ne fait pas longtemps. Elle a remarqué qu’il avait maigri ces derniers. Malade ? Il a l’air morose aussi. Elle lui a offert sa bière, il ne s’en est même pas aperçu.

*

Il voudrait croire que les choses vont s’arranger. Il sait qu’il va trop vite et qu’il en veut trop. En même temps, il faudrait qu’elle lâche un peu de leste au lieu de freiner des quatre fers. Lui, il sait que cela pourrait faire en sorte que l’incompréhension arrête de s’agrandir. Il a besoin d voir que les choses évoluent et ne stagnent pas.

*

Un truc de fou. Elle lui a glissé vite fait bien un petit papier avec son numéro. Il a hésité mais il l’a pris. Etait-ce de l’hésitation ? De la surprise ? Bah, s’il est intéressé, il l’utilisera sinon il le jettera.

*

Dilemme. La petite serveuse lui a filé son numéro de téléphone. Il en a parlé à celle qui s’éloigne de plus de plus, de jour de jour. Elle a paru agacée. Elle a noté son numéro de téléphone au dos du papier et elle lui a conseillé de lui donner comme son propre numéro. Il l’a regardé. Il lui a dit qu’il ne savait pas s’il pouvait faire cela. En même temps, pourquoi le ferait-il alors que rien ne semble s’arranger ? Au final, il finit par se demander à quoi il joue en étant aussi honnête.

*

Il continue de venir. Il ne l’a toujours pas appelée. Et pourtant, il lui sourit. Il a l’air de plus en plus creusé. Qu’est-ce qu’il attend ?

*

Week-end réussi. Elle a l’air d’avoir apprécié mais toujours aussi distante. Dans son téléphone, il a mémorisé le numéro de la petite serveuse et il s’est promis de l’utiliser si tout vient à s’écrouler avec l’autre.

*

Pas venu aujourd’hui. Trop triste. En même temps, pas le temps de trop y réfléchir.

*

Rupture. C’est fait. Il ne comprend pas. Il n’est pas triste. Mieux que cela, il a envie de passer à autre chose. Cela fait deux semaines déjà qu’il y pense tout en s’interdisant de le faire. Il téléphone. La fille qui lui a donné son numéro décroche. C’est étrange mais bien. La discussion est courte et facile. Ils se donnent rendez-vous le soir même pour vingt heures.

Quand il raccroche, il a cette impression de plus être tout à fait lui. Il est libre, de nouveau prêt à être heureux, prêt à donner à qui voudra bien. Il rentre en tramway chez lui. Le temps de manger un morceau vite fait sur le gaz, il est presque l’heure qu’il y aille. Il rappelle. Précision sur le lieu de rendez-vous. Vingt minutes plus tard, il est là.

Elle aussi est déjà. Elle est habillée en bonbon italien rose, le dos nu, les cheveux attachés en arrière. Elle est jolie et même craquante comme cela. Ils partent en marchant tous les deux. Elle lui dit que cela lui fait bizarre. Quand il lui demande pourquoi, elle lui répond que cela lui fait bizarre de le voir en dehors du boulot. La remarque est anodine, pense-t-il, il n’y prête aucune attention. C’est vrai qu’après tout cela peut faire étrange.

Où aller ? Lui n’y a pas vraiment réfléchi mais il pense au bar où il avait été la première fois avec celle avec qui il vient de rompre. Etrange choix peut-être mais en attendant, il ne faut pas chercher midi à quatorze heures, il aime bien ce bar.

*

C’est leur second rendez-vous. Ils se rejoignent en fin d’après-midi et retournent dans le même bar que la première fois. Ils discutent, s’observent et s’étonnent d’avoir tant de choses à se dire. C’est étrange mais le contact est facile, ils ne réfléchissent pas trop. Ils parlent tellement que l’heure tourne et ils se rendent compte qu’il leur faut trouver un restaurant. Ils ont projeté d’aller au cinéma ce soir. Ils vont dans une petite pizzeria pas très loin. La terrasse est comble. Ils sont un peu à l’écart des autres tables.

*

Il l’a raccompagne jusqu’à sa voiture. Lui est garé un peu plus loin. Il est séduit. Il ne sait pas vraiment comment il va faire pour lui faire comprendre. Dans sa tête, c’est un combat. Il a peur de montrer ce genre de sentiments car il a toujours l’impression de s’exposer.

Ils arrivent au niveau de la voiture. Ils se regardent et échangent deux trois sans importance, histoire de dire qu’ils ont l’un et l’autre, apprécier la soirée. Ils se rapprochent pour se dire « à plus tard ». Il ne sait pas pourquoi mais il rapproche ses lèvres des siennes. Le mouvement est intuitif mais elle se ravise et se recule. Ils se regardent. Lui comprend mais voilà, c’est son cœur qui s’est exprimé et pas sa tête. Cela se lit dans ses yeux. Après un petit instant ou un grand peut-être, ils finissent par se faire la bise tendrement. Ils ne se sont rien dit mais en même temps, ils se sont tout dit.

Cela fait parti de ces moments inoubliables.

*

Il ne pense pas avoir de nouvelles avant la semaine suivante et il se trompe. En fait, il ne sait pas si c’est le fait que la soirée de jeudi lui ait vraiment plue comme elle lui l’avait dit par un SMS quelques minutes après qu’ils se soient quittés :

« Juste un piti mess pour te remercier,g passé une bonne...meme très bonne soirée.bon courage pour demain dur dur le réveil...biz... »

En tout cas, il reçoit un nouvel SMS qui lui paraît la preuve qu’elle s’intéresse à lui :

« Coucou jeune homme je suis au boulot et g regardé mes horaire pr la semaine prochaine donc si un ciné Ça te dit toujours je travail pas demain soir et lundi soir. voilà. bonne soirée à toi. biz. »

C’est étrange mais au moment où il reçoit le message, il est en train de se tâter pour lui envoyer un message. Comme jeudi soir, ou plus exactement vendredi matin, il s’en est un peu voulu d’avoir essayé de l’embrasser alors qu’il savait parfaitement qu’elle n’en était pas encore là, il s’interroge à propos de savoir s’il vaut mieux qu’il la laisse tranquille pour le week-end ou s’il faut qu’il maintienne le contact. Avec ce message, cela lui enlève la question. Alors il lui répond en tout honnêteté :

« J'allais jst t'env un msg pr savoir comnt allait ma Nymphette préférée. Pr le ciné, dem1 no souci. lundi soir, vais sûrmnt manger avc un ami. Passe-moi un coup de tel qd tu seras rév dem1 pr kon qd & où on se rejoint. Bon courage. Bisous. »

Le contenu du message lui parait suffisamment équilibré pour montrer la tendresse qu’il éprouve pour sa Nymphette sans pour autant, être trop démonstratif sur son affection. Cependant, un paramètre lui a échappé (mais il ne pouvait pas le savoir). Second message de Nymphette :

« Ok PITI lou mai je t'appelerai après mon TAF car je travail demain midi. bisous à dem1. »

Il hésite à répondre mais pour quoi dire ?

*

Ils se garent. Il sort de la voiture. Elle ferme la portière et sort, elle aussi. Ils se regardent. Il ne sait pas ce qu’elle va décider.

« Tu veux monter cinq minutes ? »

Elle ne répond pas. Elle ne sait pas. Ils s’approchent l’un de l’autre. Il la prend dans ses bras. Elle tremble un peu. Lui aussi est fébrile. Ils ont le regard de l’un plongé dans celui de l’autre. Ils savent ce qu’il va se passer. Maintenant, c’est évident et inévitable. Leurs lèvres se rapprochent et ils s’embrassent. C’est un baiser long et tendre. Chacun ferme les yeux pour ne garder que la sensation. Quand leurs visages s’écartent enfin, ils se regardent de nouveau.

Ils se prennent la main et montent alors à l’appartement en silence. Ils s’arrêtent presque à tous les étages pour s’embrasser. Chaque fois, leur peur, leur timidité respective s’effacent un peu plus. Il ouvre la porte de l’appartement, ils sont encore enlacés. Il referme maladroitement. Puis ils glissent lentement mais sûrement vers la chambre. Leurs esprits commencent à s’échauffer. Ils ont envie l’un de l’autre. Cela devient évident maintenant. Ils tombent sur le lit, complètement habillés. Leurs corps commencent à se répondre. Ils sentent la chaleur que l’autre dégage. Cela dure une éternité.

Puis ils font une pause.

« Tu veux rester ? »

Il n’obtient pas une réponse verbale mais un simple regard, une simple expression. Il la serre dans ses bras. Ses mains parcourent son corps et enlève les dernières barrières. Comment décrire ces instants-là. Ces minutes qui durent une éternité.

*

Deuxième nuit chez lui.

*

Elle s’en va. Il est un peu triste mais son cœur lui est heureux. Il faut bien qu’elle aille à son boulot des fois. Il sourit. Il traîne un peu : c’est le week-end. Il se fait un petit déjeuner tranquillement et il se décide à prendre un bain pour se délasser de la semaine. Il est comme sur un nuage, il flotte dans un brouillard de tendresse, de désir et d’amour. Cela peut paraître ridicule mais lui, il est comme cela. Quand il commence à aimer, il n’a plus de honte, plus de timidité par rapport à ses sentiments. Pourquoi en aurait-il ? Tout ce qu’il ressent, ce sont des trucs qui viennent de ses entrailles. Au fond de son bain, il ferme les yeux et rêve éveillé.

Soudain, la sonnette de la porte d’entrée résonne. Il se rince rapidement. Qui est-ce ? Il n’attend personne. Il attrape un serviette et répond à l’interphone : c’est elle, elle est revenue juste avant de partir en speed au boulot.

Elle monte et il lui ouvre. Il la prend dans ses bras et ils s’embrassent, ils s’enlacent. Il la porte vers le canapé. Ils se fouillent. Elle sent qu’il a envie d’elle. Seul sa maigre serviette de bain fait barrière. Elle fait glisser la barrière. Il lui enlève ses dernières défenses. Il l’emmène dans la chambre et la pose sur le lit. Ils sont un peu sauvages. Ils font l’amour en dix minutes.

Ils se regardent. Il est encore en elle quand elle regarde sa montre. Elle a un sourire.

« Je vais être en retard. »

« Sniff. » laisse-t-il échapper, un sourire en coin.

Il la laisse s’évader. Elle s’éclipse dans un dernier baiser.

Une heure se passe et elle lui envoie un message.

« G adoré ce matin... »

Que dire de plus ?

*

A quinze heures, ils se rejoignent au petit bar habituel. Ils sont amoureux et cela se voit. Les autres les regardent mais eux s’en fichent. Ils parlent, partagent et s’embrassent. Il n’y a pas de règle en amour et même si il y en avait, ils les briseraient sans effort.

*

(en cours d’écriture)

*

Ce matin-là, il la regarde longuement dormir. Il passe doucement sa main sur chaque centimètre carré de sa peau pour voir si elle est réelle ou si elle n'est qu'un mirage issu de son imagination.

Il se prépare pour le boulot et pendant qu’elle dort encore, il pense que tout est possible après tout. Mais il est encore dans un petit nuage. La nuit est courte comme toujours avec elle.

Il partira en lui laissant ses clés pour le lui dire, et si elle dit pas non ça voudra dire qu’elle m'aime. Il a des doutes sur ce qu’il fait : trop tôt, trop lourd à porter ?

Alors il retourne la regarder. Elle se réveille alors avec ce petit brouillard d'amour dans les yeux. Ses doutes disparaissent.

Ils s’embrassent et il s’en va.

Le soir, quand il revient, il trouve un mot d’elle comme pour lui dire qu’il ne s’est pas trompé :

« Je suis trop contente d'avoir passé la nuit avec toi. Je te fais tout plein de gros gros bisous d'amour, ptit lou. Enormes bisous. »

C’est écrit sur un morceau de papier essuie-tout. C’est dérisoire mais c’est tellement joli. Il a des larmes qui lui montent dans les yeux. Même s’il s’en veut un peu d’être touché par si peu de choses, il a tellement attendu cela qu’il est tout simplement heureux de ressentir une émotion sans fard, ni paillette, pleine de petits riens.

*

Il ne sait plus quoi faire. Sa tête va exploser et personne ne lui semble valable pour lui donner un conseil quelconque. Il va sur Internet et il poste un message sur un forum.

« Je vais essayer de faire court mais voilà j’ai entamé une relation il y a trois mois avec une fille qui est venue vers moi et nous sommes ensemble. Sauf qu’elle a un mec qu’elle n’aime plus mais qu’elle ne veut pas quitter parce qu’elle ne sait pas ce qu’il ferait. Moi, j’ai ignoré cet élément au départ puis je lui ai dit que ça ne me dérangeait pas. Elle pouvait prendre le temps qu’il faudrait. Et puis les vacances, retour de son mec, impossible de la voir et depuis, c’est un vrai casse-tête. Moi, je m’énerve de la situation et elle me dite de ne pas en rajouter. Mais bon, si je suis pour quelque chose dans le fait qu’elle est entre deux mecs, moi je ne suis pour rien si elle ne quitte pas son mec. Donc ça fait quatre semaines qu’on ne se voit pas, elle n’a pas l’air de vouloir me quitter (en même temps, c’est pas facile à savoir). Elle me dit qu’il faut qu’on discute mais elle ne vient pas et moi, je ne vais pas débarqué chez elle ! En clair, je suis paumé… Si quelqu’un peut m’éclairer… »

Quand il appuie sur la touche pour envoyer le message, il se dit en même temps que le résumé est vraiment très résumé. Il va chercher une bière dans son réfrigérateur. Dix minutes se passent, première réponse.

Deborah90 laisse un message assez radical :

Laisse tomber cette fille :

1. elle ne sait pas où elle crèche

2. elle n’a pas l’intention de quitter son homme (ou pas dans l’immédiat)

3. 1 + 2.

Il répond :

C’est pas un peu radical ? Comprends pas pourquoi elle m’a dit qu’elle m’aime trop la dernière fois que je l’ai vue…

Cette fois, c’est Sarah-h qui lui répond.

Désolé mais je pense que tu vas droit dans un mur.

Ca fait combien de temps qu’elle est avec son copain ?

Sérieusement, c’est une drôle d’histoire. Pourquoi as-tu accepté qu’elle sorte avec un autre gars en même temps ? Tu n’as pas pensé que cela allait créer des problèmes ? J’espère simplement que tu ne t’es pas attaché à elle…

Laisse-la tomber ! Elle n’en vaut vraiment pas la peine.

Et moi aussi je sais dire je t’aime à n’importe qui…

Courage, bisous

Le bisou le réconforte. Il aime la tendresse même s’il vient de nulle part. Il répond :

4 ans et c’est son premier.

Pourquoi j’ai accepté ? En fait, je ne sais pas. J’ai enchaîné cette relation après avoir mis un terme à une autre qui a été une longue agonie d’un mois. En plus elle est plus jeune (cinq ans) et je sais ce que c’est que quitter son premier amour (c’est compliqué). Et puis c’est super étrange peut-être mais les choses se sont faites vite et simplement donc pas besoin de se poser de questions. Et pour la dernière question malheureusement, si. J’ai commencé à super accroché la semaine d’avant que la chanson je t’aime moi non plus commence.

C’est alors qu’Ophelie1234 intervient :

Sérieusement si elle était vraiment amoureuse, elle l’aurait déjà quitté. J’ai quitté moi aussi mon premier amour pour un autre. C’est difficile mais par amour, on peut tout faire.

Il était d’accord avec Ophelie1234. Dans un monde ordinaire et normal, par amour, on peut tout faire… Mais. Peut-être qu’Ophelie1234 avait raison mais alors…

Mais alors pourquoi venir me chercher ? J’étais encore avec ma longue agonie et c’est elle qui a insisté. C’est elle qu’a commencé à s’installe chez moi. Pour ma part, c’était un peu compliqué de laisser des affaires à moi chez elle avec son tabilan. C’était juste pour les vacances ? Ou c’est du sadisme. Il s’est déjà pris un mur juste avant moi et je vais lui en faire manger un second. Mais c’est vrai que c’est pas clair, les raisons pour lesquelles elle ne quitte pas.

Ophelie1234 ne met pas longtemps à lui répondre :

Vas savoir il y a des gens qui aiment jouer. Ou qui veulent le beurre et l’argent du beurre. Parfois aussi il ne faut pas tenter de comprendre certains comportements au risque de toujours trouver des excuses. Si tu n’es pas heureux, fais en sorte de prendre une décision qu’elle n’est apparemment pas capable de prendre. Soit elle le quitte et vous commencez une jolie histoire sans l’autre dans les parages. Soit elle reste avec et tu la quittes pour être heureux avec une autre qui voudra être avec toi et SEULEMENT avec toi.

Commencer une jolie histoire. C’est ce à quoi il a aspiré depuis le début, quelque soit les circonstances. Non, il n’était pas heureux. Oui, il savait que la décision, c’est lui qui devrait la prendre car, oui, il savait aussi qu’elle ne la prendrait jamais. Elle n’avait pas quitté l’autre alors que c’était son officiel, alors lui. Mais voilà, il marche encore sur la tête et son espoir est plus fort que son désespoir. Il poste alors une réponse :

Je pense à cette solution car cela me paraît la plus équilibrée. Je n’ai pas envie d’être un bourreau : si jamais elle m’aime toujours, j’ai pas envie de la faire souffrir (c’est p’têt étrange, mais œil pour œil, dent pour dent, je ne sais pas faire, je suis pas un méchant à la base). Et puis je pense qu’il faut p’têt lui donner une chance d’expliquer son comportement (soit dit en passant, le changement de comportement a été radical à partir du moment où l’autre a été là). Elle qui était ouverte, bavarde, pétillante, elle s’est transformée en huître !

Ophelie1234 ne tarde pas à lui répondre.

Je te comprends Tilou mais pense à toi que diable ! Tu peux trouver mieux vas.

Tilou ne connaît pas celle qui lui dit cela mais si il en avait la possibilité, il se jetterait dans ses bras comme un petit bébé. Il a la migraine. Il va se prendre un cachet avant de poster une réponse.

L’égoïsme n’est pas naturel chez moi. Il faut me provoquer très fort pour que je réagisse ainsi. Pour trouver mieux, va falloir que je m’en persuade. Deux échecs en un an, commence à penser que c’est moi qui déconne. Trop vite dedans ? Mais à ce moment-là, faut qu’on me dise comment on fait pour graduer ? Quand je pars à aimer, c’est tout qui part en même temps… Que la fille soit célibat ou pas. En même temps, c’est la première fois que je suis dans une situation de triptyque.

*

Lundi. Il hésite encore mais avant de franchir le pas de sa porte pour partir au boulot, il se décide à lui envoyer un message. C’est important. Après, tout risque de lui échapper et il sait qu’il n’aura pas la force de résister au rouleau compresseur. Il a pourtant mille raisons de lui laisser du temps au temps malgré l’absurdité de la situation. Mais il y a tellement de choses qui sont floues.

Midi. Pas de réponse. Il lui envoie un nouveau message. Plus explicite. Chaque fois, il a l’impression de se poignarder un peu plus mais l’enjeu n’en est plus à lui-même. Il préfère que l’histoire reste entre lui et elle, même si cela n’a jamais été tout à fait vrai. Trop d’acteurs. Les choses ont été trop vite. Beaucoup trop vite.

Quinze heures. Message bizarre. Une non réponse. Il devrait commencer à en avoir l’habitude mais chaque fois, en fait, c’est un peu d’incompréhension qui s’immisce dans sa tête. Et si, et si, et si… Trop de zones d’ombres, trop de malentendus. « Je ne suis pas dans ta tête, amour… ». Il répond, insiste et obtient enfin une réponse. Les autres le regardent et ne savent rien de ce qui se joue. Ce n’est sûrement pas le moment, pas la manière mais comment faire autrement. Il envoie une dernière question. Il a le cœur lourd, la tête pleine de questions parce qu’il devine certaines choses. Il se dit que c’est lui qui invente parce qu’elle ne lui dit rien qui pourrait étayer le scénario qu’il a imaginé. Il n’a pas osé le mettre par écrit même s’il en a écrit des choses. Ce scénario, c’est peut-être le pire ou le meilleur. En fait, il ne sait pas, il ne sait plus, tous les repères ont disparu. Sa tête et son cœur sont dans le vide quand il pense à cela.

*

Arrivé chez lui, il prend son bloc de correspondance et un stylo. Il faut qu’il lui écrive une dernière lettre. Il sait qu’il ne saura pas quoi dire et qu’il ne pourra rien dire. Il aura le cœur et la tête trop en miettes pour parler et dire des choses sensées. Il se connaît. Dans ces moments-là, il ne sait rien faire. C’est tellement à des années-lumière de lui-même…

*

Mardi. C’est le jour de la rupture officielle. Programmée mais pas tout à fait fixée. Il est heureux comme il est triste, toujours naviguant entre des sentiments contraires, le cœur guimauve qui saigne encore de cet amour incroyable et incontrôlable, la tête et ses raisons qui lui commande de survivre, de s’enfuir avant que la fêlure ne soit fatale. En fait, il sait qu’il gardera une trace indélébile, le genre de blessure qui ne guérit jamais tout à fait. Il a déjà été dans l’extrémité, mais là, il a vu le bord du gouffre. Peut-être même y a-t-il mis un pied ? Pourquoi se dit-il cela ? Parce que une personne normale se sauverait devant cette situation. Elle chercherait à se protéger. Mais lui, il fait les deux en même temps. Même s’il ne le veut pas, il juge celle qu’il appelle son amour mais il n’arrive pas à se dire qu’elle est coupable de quoique ce soit. Peut-être que c’est incompréhensible pour le quidam moyen, mais il se sent capable encore de lui tendre la main au risque que lui ou elle entraîne l’autre cette fois-ci dans une chute vertigineuse au fond du gouffre. C’est le bordel.

Il se lève, se prépare et part au boulot comme d’habitude. Il évite tout le monde mais c’est peine perdue. C’est à croire que le destin veut absolument s’acharner contre lui. Ce qu’il déteste ? Que les bonnes et simples âmes qu’il croise, lui demande comment il va. Pas bien mais leur petite cervelle ne comprendrait. Quand les gens demandent comment ça va, ils n’attendent pas de réponse négative. C’est l’hypocrisie de ce monde.

Les heures passent et il ne sait toujours pas quand le moment va arriver. Il s’énerve, il est déplaisant parce que tout le monde sourit, rigole. Il l’aime toujours, il sait qu’il va la quitter, il a envie de pleurer et tout autour de lui, tout est frivole, léger. Il voudrait pourvoir suspendre le temps, s’arrêter de vivre juste un instant. Mais le temps, lui, n’en a rien à faire que les gens aient le temps de faire le chemin qui pourrait les conduire au meilleur. C’est valable dans ces périodes sombres comme celles où tout va bien. Il a tellement de questions dans sa tête et il sait tellement qu’au moment où il faudra qu’il les pose, il n’en sera pas capable ou il les posera mal. C’est sempiternellement le même scénario. De toute façon, cela se passera mal.

Message. Non il n’est pas chez lui. Finalement, elle lui dit qu’elle n’a pas le temps.

Quelques minutes passent et finalement, elle est chez elle : il peut passer s’il veut.

Il quitte alors le boulot comme un somnambule. Il a la tête vide. Il n’a plus de sentiments. Il a l’impression de ressentir la même chose qu’un condamné à mort ressent quand il marche vers la mort. Toutes les émotions, les idées sont équivalents. Rien n’est bien, ni mal.

Quand elle lui ouvre, il ne la reconnaît pas.

Il entre. Elle lui propose un verre. Non, ça, il ne peut pas. Il sent sa gorge complètement serrée, sa tête complètement vidée de toute idée. Tout n’est que douleur, un truc qui le traverse de part en part.

« Tiens. » articule-t-il.

Elle prend le sac plastique et lui tend le sien.

« Fais gaffe, il y a tes clés dedans. »

Encore un silence. Ni lui, ni elle ne bouge.

« Tu n’as rien à dire. »

« Non. Je crois que je t’ai tout dit. »

Il détourne le regard et fixe un point imaginaire. La tête lui tourne. Il ne sent vraiment pas bien. Il n’aime être dans cet état. Il sait qu’il peut se révolter et dire des mots qu’il n’a pas envie de dire. La rancune ne sert à rien même si on peut l’éprouver.

« Bon, bah, salut. »

Il se dirige vers la sortie.

« Juste un truc. Voilà… Y a une lettre dans le sac… T’en fais ce que tu veux, tu peux la lire, la garder, la jeter au feu, enfin voilà. »

Il sort. Elle claque la porte. Il ne se retourne pas. Il a l’impression de marcher au ralenti. Devant sa voiture, il reste un instant immobile. Le temps s’arrête. C’est comme cela ? La fin ? Le point final de ce rêve doit-il être aussi absurde que l’histoire était jolie ?

Il monte dans sa voiture, démarre et s’en va.

Son cerveau se remet à mouliner au fur et à mesure qu’il s’éloigner. Il a des larmes devant les yeux et il ne voit plus la route. Il entend des coups de klaxon mais tout cela n’a pas d’importance. C’est la réalité, cela. Ce n’est pas sa vie. Sa vie n’est pas comme cela.

Il prend son téléphone et pianote un SMS :

« Juste un truc aurais voulu te serrer une dernière fois dans mes bras »

Il arrive à un feu rouge et il voit alors qu’il a reçu un message, ou plutôt deux :

« Juste un petit truc sans importance que je voulai te dire mais la discussion n'étai apparemen pas au rendez vous:g 2 mois de retard... »

« Et tu t'en fou que g 2 mois de retard? c pas grave ? CHUI pt etre enceinte mais pas grave? »

Quoi dire ? Dans sa tête, c’est le raz-de-marée. Il y a tellement pensé. Comment peut-elle croire qu’il s’en fout ? Depuis quatre longues semaines, il a cette idée qui lui trotte dans la tête. Depuis quatre semaines, il voudrait la voir pour trouver les mots pour aborder la question. Depuis quatre semaines, il est dans le flou total avec ce qu’il sent par intuition et ce qu’il sait réellement. Elle est où la réalité dans tout ce merdier ? C’est quoi la vérité ?

« Le reviens » il envoie.

« Non y à rien à dire de plus je voulai que tu le sache c tout » répond-t-elle comme si il s’agissait d’une information comme une autre.

Cela le met hors de lui.

« Le le savais »

« Commen Ça? »

« Parce les symptomes »

La réponse est complètement délirante.

« Mais non y à pas de symptome quoi Ça veut dire que g grossi? non ba Ça Ça arrive sans etre enceinte,mais y à pas de symptome.tu me fai FLIPE là »

Dans sa tête, il se repasse tous les échanges qu’ils ont eu par SMS et par mail. L’expérience. La différence d’âge. Oui, cela fait une différence. On ne balance pas des choses comme cela pour rien. On ne prend pas ce genre de choses à la légère. « Toi, tu n’y as peut-être pas réfléchi depuis des années ». Six ou sept ans qu’il garde cela dans un coin de sa tête en permanence. Il ne répond pas. Il a déjà fait demi-tour, faillit emboutir deux ou trois voitures au passage. De toute façon, il s’en fout. La route, il ne la voit plus au travers de ses larmes. C’est cela qu’elle appelle essayer de gérer sa vie. C’est pour cela qu’elle ne voulait plus le voir. Pour éviter de se confronter à la réalité. « Suis-je enceinte ? Qui est le père ? ». Parce que, maintenant les pièces commencent à s’emboîter.

« Mai je ne te reproche rien c toi qui ma dit que qd y avait d problèm comme Ça fallait pas se dire que s'étai juste de notre faute c pas toi qui à mal fai alors arrete de te monté la tete tu n'à fait qu'etre toi.et moi aussi c ce que g fait seulement je peu pas géré mes problèmes et 2 mecs.tu voi mes problème passe avant le fait d'etre avec quelqu'un ou pas. c pas mon centre d'intéret du moment je peu pas m'occupé de Ça et suis g meme pas envie d'y pensé. c ma vie c pas celle de l’autre ni la tienne alors je pense que c plus important de réglé ce qui se passe dans ma tete je peu pas n'etre qu'à demi avec toi je peu pas t'infligé Ça je peu pas passé d momen avec toi si je pense à tout ce qui va pas. ok un couple c censé partagé ces problème justemou mais pas au bout de 2 mois. »

Il a ce message qui lui revient en mémoire. « C’est quoi, le centre d’intérêt ? Toi ? Ben non. Là ça ne marche pas comme cela. 2 mois en plus, pauvre gamine pas finie. Cherche pas pourquoi t’es malheureuse et que tu ne réussis rien. Même devant un choix, tu choisis de ne pas choisir, de laisser toutes les portes ouvertes, de prendre tous les chemins et tu crois que cela va te mener quelque part ? Oui, là, cette fois, tu auras peut-être le droit de dire que je suis méchant mais en même temps, est-ce vraiment de la méchanceté ? Toi qui ne fais pas la différence entre contrainte et engagement, comment veux-tu faire la différence entre quelqu’un qui te secoue pour que tu réagisses et quelqu’un qui te donne un coup ? »

(suite en cours d’écriture)

*

Mercredi. L’histoire continue. Malgré l’impression laissée par la conversation d’hier, il reçoit un message qui lui dit que, finalement, elle a compris que rester dans l’expectative n’était pas bon. Elle a réalisé aussi ce qu’elle lui avait dit en guise d’adieu. « C’est fini. Mais pas tout à fait ». A-t-elle pensé aussi que dans tout ce bordel, c’était quand peut-être la première fois que l’on lui annonçait qu’il était père et qu’en même temps, quoiqu’il se refuse à se poser la question trop tôt, il y aura un choix terrible. L’a-t-elle pensé ? Peut-être, peut-être pas, elle a aussi les mêmes questions dans la tête sûrement.

Il l’appelle. Ce n’est pas évident. Il lui dit de prendre les questions une à une et pas d’anticiper. Ils plaisantent. Il lui explique encore certaines choses sur ce que lui a pensé et quand. Il n’y a pas vraiment de but à cela sinon enlever l’ambiguïté de quelques questions posées à la place d’autres. « Est-ce qu’il y a quelque chose que je devrais savoir ? » au lieu de « Est-ce que tu es enceinte ? ». En relisant le fil des événements plus tard, il se rend compte que la question est arrivée avant ce qu’il lui a dit. Deux heures avant. Mais c’est vrai que tout était flou. Il parle encore. Elle parle. Il fera ce qu’il faut même si se replonger dans ce passé encore brûlant, ce n’est vraiment pas facile. Ils se disent « Bisous », un peu comme avant. Il faut attendre demain. Une attente énorme. Quelle certitude auront-ils après ? Il ne sait pas. Il ne sait pas quelles informations, quel crédit peut-on leur accorder ? Sera-ce suffisant pour mettre un point final à cette histoire ? Il se surprend à avoir des espoirs. Non vraiment, c’est dur. Il n’est pas guéri. Il est allé plus vite que son cœur et maintenant, il doit assumer cette contradiction. Sa tête fonctionne à l’envers de son cœur. Cela pourrait être une belle formule littéraire de fiction : mais voilà, tout cela c’est bel et bien la réalité, une réalité qu’il faut gérer.

*

Jeudi. La journée est interminable. Il a du boulot par-dessus la tête mais il n’arrive pas à se fixer. Le temps est bizarre. C’est long et court à la fois. Les heures défilent à toute vitesse mais il a l’impression que le temps a suspendu son cours. Il se dit que tout ceci est un cauchemar et par moment, il se dit que cela peut être aussi un espoir d’un retournement de situation qui arriverait en retard. Il ne sait pas s’il ne l’aime plus parce qu’autant, au fond, cet espoir réchaufferait son cœur, autant dans sa tête, ce serait un peu comme si le cauchemar continuait. Tous ses sentiments et ses idées sont contradictoires. Il sait qu’il pourrait tout dire et son contraire dans une seule et même phrase. Il sait l’heure de son rendez-vous chez le médecin. Quatorze heures trente, l’heure passe. Une autre heure et encore une autre. Pas de nouvelles. C’est quoi ce silence ? C’est le calme avant la tempête ou l’inverse. Cinq heures, il quitte le boulot. Les gens dans la rue lui semblent être des ombres, des pantins. Ou peut-être est-ce lui l’ombre et le pantin ?

Une fois chez lui, il se prend une bière. Pas de nouvelles. Il envoie un message. Il sait pas trop comment le tourner mais au bout de la dixième version, il finit par trouver une formulation qui lui paraît neutre. Il marque un temps d’hésitation avant d’appuyer sur le bouton [Envoyer]. Accusé. Puis deux heures passent. Il ne tient plus. Il appelle, laisse un message. Il ne sait plus depuis combien de temps quand le message tombe « Tu peux m’appeler ? ». Il appelle. Comme d’habitude, la conversation lui semble irréaliste. Elle lui dit que c’est confirmé : elle est enceinte. Et ? Que ce n’est pas lui le père. Et là, c’est un peu comme si deux mondes se mettaient à coexister dans sa tête. C’est à la fois, la sortie du tunnel et l’entrée dans un autre où normalement, il ne devrait pas mettre les pieds. Mais voilà, c’est un peu de cette histoire sans queue ni tête qui se poursuit.

Elle ne sait pas s’il faut qu’elle le garde. Elle en a envie mais elle n’aime pas le père. Elle ne peut pas en parler avec lui parce qu’il est forcément d’accord pour le garder. Il ne sait pas quoi lui dire sinon lui redire ce qu’il a essayé de lui faire comprendre pendant tout le temps de leur relation. Elle lui dit qu’il fait partie des seules personnes à la comprendre. Il tente de le cacher mais il pleure quand elle lui dit cela. Voilà toute la contradiction. Tout est dans le choix.

Quand il raccroche, il reste un moment immobile. Son cerveau se fige. Son cœur s’est remis à battre mais c’est l’incompréhension totale de la morale de cette histoire qui lui échappe. Il sait que les gens ne sont pas parfaits, ils peuvent être changeants et illogiques. Lui aussi est comme cela, sinon qu’il n’en serait pas arrivé là. Mais là, ce n’est plus de cela qu’il est question. Il n’y a pas de morale, ni vraiment de leçon à tirer de cette histoire. Du moins, pas tout de suite. Et puis si, en fait, juste choisir aurait changé le cours du récit. Ne pas rentrer dans cette histoire sans imposer en préalable ce choix. Ne pas laisser de côté les choses qui ne vont pas bien, choisir de les changer. Choisir. Choisir. Choisir. Juste cela.

Il a les larmes qui lui montent aux yeux. Son cœur fait des nœuds. C’est peut-être aberrant mais il aurait voulu que la réalité soit différente. Il a tellement rêvé de ce moment-là, que ce serait la plus belle chose de sa vie. C’est égoïste de penser cela. Il met sa tête sous l’oreiller pour que personne n’entende. Il pleure tout cela.

*

Trois semaines. C’est ce qu’elle lui a dit au téléphone. En reprenant le fil des événements, les dates, cette histoire n’a aucun sens. Elle s’est foutue de lui jusqu’au bout. Elle s’est remise avec son mec avant même de lui dire qu’elle ne voulait plus de lui. Alors comment lui pardonner ? Comment être là pour une personne qui n’affronte rien de la réalité, qui ne sait pas, ose-t-il encore croire, qu’elle fait du mal ? Lui pour qui un enfant est un désir qu’il couve depuis des années, depuis qu’il a dix-huit ans et qu’il n’a jamais pu, ne serait-ce imaginer que cela puisse arriver car jamais la situation n’a été favorable. Comment pardonner le fait qu’à chaque fois qu’il entendra le mot « enceinte », c’est cette histoire qui lui reviendra en tête comme un cauchemar ? Il poste cette question sur un forum sur le Net mais personne n’ose lui répondre.

Dans tout ce qu’il écrit depuis des années, il a ce rêve de ce ventre rond qui se tend. Il a ce rêve où il pose son oreille contre cette paroi et il entend ce cœur battre. Ce n’est pas le sien mais c’est tout comme. Et maintenant, ce qui était un rêve est une souffrance dans sa tête qu’il n’arrive pas à ôter. Personne ne peut comprendre pourquoi ce désir est si profond chez lui. Lui le sait et maintenant, il se sait condamné à garder ce souvenir de merde incrusté dans le creux de ses neurones. Il a envie d’hurler sa haine. Il a envie de ne plus exister. Cette terre est faite de fange alors pourquoi prolonger le voyage ?

*

Encore un soir où il repense à tout ce qui s’est passé. Il sait que cela est vain et qu’il n’aura aucune réponse à ses questions sinon celles qu’il s’inventera. Quel intérêt pourront penser certains ? Pas grand-chose serait-il tenté de leur confier sinon que de calmer cet incessant manège de questions tournantes dans sa tête.

Il repense à ce soir-là où ils se sont embrassés goulûment devant tout le monde sans avoir de retenue ni pour eux, ni pour personne. C’était de l’amour pur sans fard ni paillette. Il repense à cette photo prise sur le vif de cet instant où rien ne pouvait les atteindre. Etait-ce un instant futile, un simple caprice de deux gamins qui refusent la réalité. Non. Ce n’est pas qu’il veuille transformer l’histoire mais il ne peut pas croire que ce soir-là n’ait été qu’un concours de circonstances.

Il repense à cette nuit où, après son boulot, elle est venue chez lui. Il souvient du message : « Tu prépares le bain ? ». Ce bain où ils étaient trop bien, nus l’un contre l’autre.

Chapitre 6

Tout a commencé dans la chaleur de juin. A l’époque, tu me regardais avec tes yeux gloutons. J’avais l’impression que tu voulais me manger et je pouvais me voir dans tes yeux d’une manière donc je ne m’étais jamais regardé. C’était une chose bizarre pour moi, je n’en avais pas l’habitude.

Tout a commencé dans la chaleur de juin. A l’époque, le temps défilait à tout vitesse. Je me rappelle du premier soir où j’ai voulu t’embrasser et où tu t’es reculée mais pas brutalement, juste pour me dire : « je ne suis pas sûr ». Je me rappelle du soir qui a suivi, quelques jours après à peine et là, tu t’es laissée faire, pas tout à fait sûre non plus : mais pourquoi pas ?

Et puis le temps a paru se distordre à tel point que, tu te rappelles, tu m’as demandé depuis combien de temps, nous étions liés : « dix ans » m’as-tu dit. Nous étions dans le même délire, à refuser de voir la réalité en face. Ce que nous faisions, cette relation passionnée qui devait restée dans le secret, nous n’avions pas vu que les autres ne l’accepteraient pas.

A ces autres, moi j’ai dit « merde ». Pourquoi l’amour ne pourrait-il pas être ainsi ? Fou, un peu naïf, et complètement en dehors de la norme. Je sais, nous n’étions pas les premiers à traverser cet interdit mais c’était nous. Les autres, qu’est-ce qu’ils comprennent de toi ? Ils ne voient que les apparences. Toi, tu ne le supportes pas, je sais. C’est pour cela que j’essaie de rester dans l’ombre même si ça m’arrive de l’oublier dans un accès de folie. Mais je croyais que tu l’avais compris.

Je suis un petit enfant qui a peur de montrer ses sentiments et quand il se sent enfin aimé et aimer : voilà, il ne peut rien. Il doit rester dans son mutisme. Et il se sent piégé. S’est-il piégé tout seul ? Non car, en fait, lui, il veut vivre, il veut t’emmener dans un monde dont tu ne soupçonnes même pas l’existence. Il veut que tu fasses tes valises et que tu partes avec lui, loin des conventions de toutes sortes.

Il n’y a pas de contraintes dans ce monde, il faut juste laisser de côté le passé où il est.

Je ne connais pas l’avenir, je ne sais pas si je t’aimerais toujours comme je t’aime là tout de suite. Mais pourquoi cet amour se tarirait ? Je n’ai trouvé aucune raison qui me fait t’aimer, je t’aime comme tu es et je suis sûr comme tu deviendras. Ce n’est pas une promesse, simplement une intuition sinon, pourquoi serais-je encore là ? J’ai de la route, tu sais, ce n’est pas la première fois que je vis cela, une petite période de froid. C’est généralement, synonyme de la fin et là, moi, j’ai l’impression que ce n’est que parce cela va commencer.

Mais voilà, il faut franchir le pas. Tu peux ne pas venir avec moi. Je respecterai même s’il doit me rendre triste. Je sais que quelques années nous séparent mais tu vois, j’ai appris qu’il ne fallait pas hésiter. Même si on doit se rendre malade, même si on doit faire une croix sur certaines choses ; de toute façon, si ces choses sont réelles, elles te suivront tôt ou tard sur le chemin que tu as emprunté.

Tu m’as dit l’autre jour que tu était égoïste : je n’ai pas dit le contraire. Tu n’es pas égoïste quand tu ne fais pas les choses sous la contrainte. Toi, tu confonds la contrainte et l’engagement. Ce n’est pas l’engagement que tu crains, c’est bel et bien la contrainte. Je ne t’ai jamais rien demandé en retour de ce que je te donnais. Ce n’est pas que je m’en fous, mais je sais, que tu me le rendras à ta façon. T’as l’impression d’être en défaut ? Pourquoi, il n’y a pas de calcul quand on aime. On se rétribue par le plaisir que partager, offrir à une personne que l’on estime.

Mais bon, toi-même, tu le dis, il faut qu’on se parle même si tu ne trouves pas le temps pour cela. L’amour, c’est une maison qui se construit à deux. De la même manière s’il est question de la déconstruire. Comme ça, il n’y a pas de haine dans la séparation. Tout autre forme, c’est de l’enfantillage et parfois, il faut apprendre cela aux autres. Moi, je l’ai appris d’une autre et même si je n’ai pas tout saisi dès le début, les années passant, elle avait raison. Elle a suivi un autre chemin sans jamais me perdre de vue. J’ai fait la même chose. Ce n’est pas vraiment de l’amour mais ce n’est pas vraiment de l’amitié. C’est autre chose. Un peu comme une sœur.

Bon voilà j’arrête là pour l’instant, mon « A ». Je sais bien que tu ne liras jamais ce billet, mais voilà, je t’aime et j’ai envie de le dire au monde entier.

Epilogue

Savoir ce que l’on a manqué. Savoir ce que l’on a au présent. Comment choisir au passé. Il aurait fallu… J’aurais du… Carole a un flottement : c’est peut-être ce sentiment que l’on appelle le blues ne pas l’appeler déprime ou dépression. Mille questions lui viennent et une seule réponse. Elle est trop petite à l’échelle de ce monde pour avoir eu la possibilité de savoir le passé, le présent comme l’avenir. Pourtant, pour une raison inconnue, on venait de lui donner l’occasion de voir deux de ses destins. Dans quel but ? Elle l’ignore. Même si la vie avec Luc tel qu'il est semblait un peu moins morose que celle que David lui faisait partager, elle ne pouvait s'empêcher de penser que ce sentiment disparaîtrait aussitôt que sa vie lui paraîtrait moins étrangère. Et si elle se trompait ?